A partir de 1941, de nombreux prisonniers de guerre français, évadés des camps en Allemagne se présentaient en Moselle, très souvent aux portes des presbytères. Ils y cherchaient une aide pour passer clandestinement de la Moselle annexée pour gagner la Meurthe et Moselle, puis la France de l’intérieur. De plus des jeunes Mosellans ne voulant pas être incorporés de force ou ne pas participer au Service du Travail du Reich (R.A.D.) utilisaient les mêmes filières. Plusieurs réseaux de passeurs s’étaient constitués avec des Lorrains courageux et désintéressés. Ils risquaient tous leur vie.
La filière Sarralbe-Dieuze
Sarralbe était devenu le relais d’un de ces réseaux, organisé secrètement avec le concours de l’abbé François Goldschmitt, curé de Dieuze et de sa soeur Marie, occupant le presbytère de Rech. Participaient également à ce réseau plusieurs autres prêtres comme le Père Joseph Haller, qui a remplacé l’abbé Jean-Pierre Karp à Kerprich, ancien curé d’Ormersviller, expulsé dans le Sud de la France par les Allemands. Plus d’une centaine de personnes ont participé de ce réseau pour passer clandestinement les prisonniers français et les insoumis en France de 1941 à 1944.
La combine des passeurs
Les prisonniers français évadés se présentaient au presbytère de Rech où ils trouvaient refuge. Certains habitants de Rech ont également abrité des prisonniers. Ils gagnaient ensuite Dieuze, en se cachant dans un train. D’autres ont été escortés par Joseph Lang, policier municipal de Sarralbe. Grâce à de nombreux habitants de Rech, Sarralbe ou Dieuze, les prisonniers ont pu changer leurs vêtements. De plus, on leur remettait de l’argent français. L’abbé Goldschmitt ou sa soeur Marie leur procurait de faux papiers, grâce à l’imprimeur Marcel Pierron ou l’ingénieur Demange à Dieuze. Très nombreuses ont été ses interventions pour les Mosellans, restés au pays, et ses protestations contre les expulsions, les incarcérations et l'introduction du R.A.D. et du service militaire. Il a été l'intermédiaire de l'Evêché et de la Gestapo de la Westmark, dirigée par le général SS Anton Dunkern qu’il avait rencontré avant 1936.
Arrestation de l’abbé Goldschmitt
Comme l’abbé François Goldschmitt s’est opposé à de nombreuses décisions prises par les nazis, rapidement la Gestapo l’a soupçonné de participer au passage en France des prisonniers français évadés et des Mosellans réfractaires. Il est arrêté le 24 septembre 1942 « car il met en danger l’existence et la sécurité du peuple et de l’Etat. Il abuse d’autre part de sa fonction sacerdotale pour exciter((les gens ) contre tout ce qui est allemand, cela d’une manière si pernicieuse et si provocante… ». Il a été interné à la prison de Sarrebruck le 8 décembre 1942, puis transféré
à Dachau où il porta secours au futur ministre Edmond Michelet. Il sera libéré le 29 avril 1945 par les Américains.
Après la Libération, l’abbé François Goldschmitt a été élu conseiller général de la Moselle et a été fait chevalier de la Légion d’honneur.
Fin du réseau
Ce ne sera qu’en février 1944, lors de l’interrogatoire d’un Lorrain que la Gestapo a eu vent du réseau. Plusieurs ont alors été arrêtés à partir du 9 février 1944: Jules Klinger à Dieuze, le Père Andrès, le Père Seiler, le père Joseph Haller
Marie Goldschmitt a été arrêtée le 7 mars 1944. Elle sera incarcérée à Sarreguemines, puis à Sarrebruck, enfin au Grand séminaire de Metz, transformé en prison. Là un gardien complaisant lui donna une piqûre dans le pied pour provoquer un oedème pour lui éviter la déportation à Ravensbruck. Après la libération de Metz le 22 novembre 1944, elle a pu retourner à Rech.
Joseph Antoine Sprunck
Sources:
- Les livrets de l'abbé Goldschmitt
- Le Pays d'Albe N°24