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Les oubliés du 11 novembre

 Il y a 103 ans,  le 11novembre 1918 la France, l'Allemagne, ainsi que les pays engagés dans la Première Guerre Mondiale signaient l'armistice dans la forêt de Rethondes. Celui-ci reconnaît la victoire des pays alliés et la défaite de l'Allemagne.

Chaque année depuis 1922, la 11 novembre est une fête nationale qui commémore la victoire, la paix, ainsi que le souvenir des 1,4 millions de soldats tombés au combat. Depuis 2012, la France rend également hommage à tous les soldats morts pour la France de manière générale.


Photo J.A.S.


En 1914/1918 on dénombre à Volmunster 26 soldats tombés au front, en 1945/1945 13 soldats et 8 civils. Dans les communes de l'Intérieur de la France les victimes de 39/45 sont en règle générale  moins nombreuses qu'en Alsace-Moselle. (JAS)


Les oubliés

 

Pourtant, certains sont des oubliés de ce conflit, dont on parle peu ou presque pas : Les Alsaciens et les Mosellans.

Si l'on connaît déjà un peu plus les "Malgré-Nous", ces soldats alsaciens et mosellans forcés de combattre dans les rangs de l'Allemagne nazie durant la Seconde Guerre Mondiale, on ne parle pratiquement jamais des Alsaciens et Mosellans durant la 1ère guerre mondiale.


Il faut connaître l'histoire de l'Alsace Moselle


L'Alsace et la Moselle sont annexées par l'Empire Allemand en 1871, suite à leur cession par la France lors du traité de Francfort  du (qui met un terme à la guerre de 1870-71). Au fil des années, l'Empire Allemand va accorder une certaine "autonomie" au territoire appelé désormais "Reichsland Elsass-Lothringen".

(L’empereur Napoléon III déclare  la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870. L’armistice est signé le 28 janvier 1871. 

Nombre de morts : environ 120 000

 L'avis favorable à la cession est voté le 1er mars 1871 par le parlement français réuni à Bordeaux, à la demande d'Adolphe Thiers, premier président de la troisième république ; le vote comptera 546 députés favorables à la cession, 107 contre et 23 abstentions.

La Moselle et l’Alsace deviennent allemandes le 10 mai 1871 suite au traité de paix signé à Francfort. JAS)


Depuis 1874, il dispose d'une chambre régionale qui exerce une partie du pouvoir législatif. En 1911, l'empereur allemand Guillaume II accorde au territoire une nouvelle constitution qui renforce son autonomie. Durant toute l'Annexion, l'empire allemand procède à de grands travaux pour faire de ce territoire une sorte de vitrine du Reich allemand face à la France. L'Alsace-Moselle bénéficie donc d'une importante croissance économique, ainsi que de nombreuses avancées techniques et sociales, ce qui en fera une période plutôt fleurissante pour le territoire.

En 1914, les Alsaciens et les Mosellans sont allemands depuis 43 ans. Une génération entière est donc née sous l'Empire allemand et la culture germanique. 


Mobilisation en 1914


Toujours en 1914, ce sont 220 000 Alsaciens et Mosellans qui sont appelés sous les drapeaux pour combattre leurs anciens compatriotes. (puis jusqu'à 380 000 d'ici la fin de la guerre). Mais pour cette génération qui a grandi dans un territoire allemand, la mobilisation s'effectue sans grande surprise ou grande révolte. Bien entendu, il existe des familles qui se retrouvent déchirées d'un côté et l'autre de la frontière, bien entendu certains ont encore le cœur lié à la France. Mais ce sont des cas exceptionnels.

Dans les rangs de l'armée française, on compte seulement

20 000 Mosellans ou Alsaciens sur tout le front.

À la fin de la guerre, ce sont 50 000 Alsaciens et Mosellans qui seront ainsi morts sous l'uniforme "Feldgrau" (uniforme allemand), parfois sur le front français, parfois sur le front russe. 


En 1918, à partir de l'Armistice, les Français font une entrée victorieuse en Alsace-Moselle et s'imposent en libérateurs. Des scènes de liesse ont lieu ici et là, parfois spontanées parfois soigneusement organisées. Des monuments aux morts fleurissent partout, leurs inscriptions sont obligatoirement en français, ne pouvant mettre les inscriptions "Morts pour la France", ce qui n'aurait aucun sens, les autorités préféreront en général l'inscription "Aux morts de la guerre", plus neutre. L'ancien Reichsland est désormais "libéré" par la France, et le territoire qui avait une certaine autonomie se retrouve scindé à nouveau en 3 départements partagés entre la Lorraine (dont fait partie la Moselle) d'une part et l'Alsace de l'autre part, deux "simples" régions françaises.


 Cependant, l'Alsace-Moselle conserve un statut juridique à part , les autorités françaises évitant soigneusement un référendum sur l'indépendance du territoire.

Du jour au lendemain, la langue française est imposée partout sans transition, et enseigné à l'école du jour au lendemain. Une politique d'épuration est mise en place, expulsant 110 000 Alsaciens et Mosellans jugés trop "pro-allemands" dans cette région où l'on ne parle presque que des dialectes germanophones. Les Français ne comprennent pas la réalité de la situation des Alsaciens-lorrains, bercés longtemps par la propagande de guerre. Ainsi, l'histoire est réécrite, on fait table rase du passé, on francise à outrance.


Les futures commémorations nationales du 11 novembre ne parlent que des victimes françaises, mais jamais des 50 000 Alsaciens et Mosellans morts durant la 1ère guerre mondiale. Pourtant, ces soldats, même morts sous l'uniforme allemands, méritent d'être commémorés, car ils font partie de l'histoire de notre région, de l'histoire de la France.


C'est pourquoi chaque 11 novembre, nous avons une pensée pour TOUTES les victimes de la Première Guerre Mondiale et de toutes les victimes de la guerre plus généralement.


Texte publié le 12 novembre 2021 par Mosellan et fier de l’être  et repris par Joseph Antoine Sprunck


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